L’histoire des pesticides depuis 1945 : une lente agonie du vivant
Alors que de multiples actions s’organisent à travers la France dans le cadre de la « Semaine sans pesticides », la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) publie son « Manifeste pour une agriculture respectueuse de la nature et des hommes » (1). Cette publication retrace notamment les 100 ans d’existence de la LPO, au cours desquelles l’association a assisté et lutté contre l’apparition de menaces toujours plus nombreuses pour les oiseaux, dont l’évolution des pratiques agricoles.
Au cours des années 1945 – 1970, l’utilisation des insecticides organochlorés, tel le DDT, se généralise, entraînant l’effondrement de la reproduction des prédateurs, et plus particulièrement des rapaces avec le Faucon pèlerin en première ligne. Rapidement, c’est au tour des organophosphorés, puissants toxiques du système nerveux, de faire leur apparition, leurs effets mortels se faisant sentir sur nombre d’animaux vertébrés et invertébrés, y compris les oiseaux. La machine est alors lancée et, à partir des années 1970, les herbicides font leur entrée. La quasi disparition de la flore indigène entraîne la disparition des invertébrés qui dépendaient d’elle. Les chaînes alimentaires sont rompues, laissant démunis les oiseaux dépendants des ressources en invertébrés.
A partir des années 1990, cette logique implacable de destruction du vivant trouve une nouvelle expression avec la mise au point des insecticides en enrobage de semences. Pour la LPO, cette nouvelle invention est le « coup de grâce » porté aux invertébrés, « entre 10 et 33 000 fois plus sensibles que les vertébrés à ces poisons ». Au c½ur du processus vital de pollinisation, les abeilles s’effondrent, de même que nombre de populations d’oiseaux (hirondelles, traquets, alouettes) qui crient famine. Selon l’association, les oiseaux soumis à l’agriculture intensive ont ainsi chuté de 30 % (1).
Inquiétant, ce bilan n’a, pourtant, pas vocation à se focaliser sur le passé, mais entend montrer l’urgence d’inverser rapidement la tendance. Des initiatives en ce sens fleurissent déjà, à l’instar des municipalités et des jardiniers amateurs qui ont abandonné pesticides et herbicides. De même, les agriculteurs biologiques ont doublé leurs effectifs en 5 ans. Mais ces progrès doivent désormais se généraliser et dépasser le stade de prises de conscience isolées pour renverser la vapeur. Sa position au sommet de la chaîne alimentaire ne préservera certainement pas l’homme, bien au contraire. Dès lors, faire bon usage du temps dont il dispose reste son principal atout. A lui de mettre un point final à la chronologie des pesticides.
Cécile Cassier
Article de Univers Nature
http://www.univers-nature.com/inf/inf_actualite1.cgi?id=5085